Déclaration de Païolive aux Vans
Réunis aux Vans et à la Grotte de la Cocalière les 13-14-15 juin 2014 autour de l'anniversaire de l'Association Païolive, nous avons reconnu l'état inquiétant de la biodiversité, de la nature et de la santé humaine, maintes fois décrit sur l'ensemble de la planète. Des menaces encore éloignées se rapprochent de notre région : effets du réchauffement climatique, choix industriels et miniers exploitant la biomasse et les ressources du sous-sol censés apporter un remède mais aggravant les maux.
C'est par la conscience que nous avons de la nature et de notre interdépendance avec elle que nous pourrons identifier les alternatives indispensables.
Cette nature, particulièrement à Païolive où le minéral et le végétal coopèrent, demeure une source d'émerveillement et de possibilités pour l'avenir.
Nous reconnaissons que la forêt, y compris sous nos latitudes, représente un accomplissement remarquable de la biodiversité sur les terres émergées, une source même invisible, de services multiples et de beauté à partager. Le jardin, ses sols, sa fertilité, dépendent des services rendus jadis et aujourd’hui par la forêt. Il y a unité du vivant entre le sauvage et le cultivé.
Il nous est apparu urgent d'établir une coopération entre tous ceux qui, à titre personnel ou au titre d'une structure, reconnaissent avec l’UICN que les solutions fondées sur la nature constitueront finalement le meilleur choix pour faire face aux problèmes comme la sécurité alimentaire, les changements climatiques et le développement économique et social.
Engagements
A titre personnel, nous nous engageons donc Ã
1) Mener un effort de conscience, d'écoute, d'observation et de réflexion partagée pour évaluer les conséquences de nos comportements et modes de vie sur les éléments (air, eau, sols) et sur la diversité du vivant. Ceci doit être fait à trois niveaux : production, fonctionnement et recyclage, à chacun desquels la nature devra nous inspirer.
2) Eviter tout comportement nuisible à la biodiversité et favoriser sa restauration et sa pérennité là où nous vivons. S’efforcer de la connaître et de contribuer aux sciences participatives.
Au titre de nos activités associatives ou/et professionnelles nous nous engageons à :
Concernant la nature et la coopération avec elle
1) Reconnaître que la vie sur Terre est une réalité fragile qui nous dépasse et nous impose des limites, et que les ressources naturelles sont un bien commun.
2) Protéger la forêt, sommet de biodiversité. Conditionner l'exploitation en coupe rase et la réserver à des cas exceptionnels. Favoriser l'agroforesterie
3) Prendre en compte systématiquement l'interdépendance avérée entre la santé humaine et l'environnement. Démasquer les manipulations et rechercher les solutions ayant les incidences les moins délétères sur la santé et sur l'environnement.
4) Etant établi que l’agroécologie peut assurer la souveraineté alimentaire, développer une agroécologie paysanne, authentique, qui prenne en compte les rapports entre biodiversité sauvage et biodiversité cultivée.
Concernant la connaissance de la nature
5) Participer aux sciences citoyennes en collectant toutes nos observations en matière de biodiversité, via les sites locaux et nationaux dédiés.
6) S'efforcer de donner un contenu concret au terme "écotourisme" en développant un tourisme fondé sur la découverte de la nature. Investir le vacancier ou le randonneur d'un rôle d'"éco-veilleur" par le relevé et le signalement des difficultés observées.
7) Développer une éducation à l'environnement à partir de l'observation de la nature et de ses cycles écologiques
Concernant les services rendus à la société par la nature
8) Interpeller les élus au niveau communal sur la nécessité de supprimer l'usage des pesticides, de repenser l'éclairage public et la gestion de l'eau,
9) Interpeller les députés français et européens pour que la politique agricole commune et ses aides financières soient orientées en faveur de la protection de la biodiversité
10) Evoluer suivant le scénario de transition énergétique proposé par négaWatt : sobriété énergétique, efficience et énergie renouvelable.
Rechercher des coopérations à l'image de la nature
11) Créer ou renforcer sur notre territoire les liens entre toutes les associations et initiatives qui ont un rapport direct avec la nature et le vivant : végétal, animal, humain.
12) Nous demander si la modestie des moyens, la difficulté du bénévolat, ne risquent pas de faire prédominer entre nous la compétition sur la coopération, et de nous cantonner à nos domaines d'activités propres. Le recours aux subventions publiques ou au mécénat devrait intervenir de façon concertée.
13) Avoir ensemble des actions de formation, des publications, des études, pour que la dimension scientifique soit vraiment prise en compte.
14) Rendre possible l'accueil de bénévoles et de volontaires dans le cadre du service civique ou d'autres formes de bénévolat.
La Déclaration : présentation
La déclaration souhaite favoriser une large coopération écologique dans le sud de l'Ardèche et le nord du Gard, où se sont multipliées des initiatives variées. Ceux qui y participent se retrouvent tous confrontés aux mêmes difficultés : changer de comportements dans un environnement social et économique qui y résiste, réfléchir aux impacts de tous nos gestes, sortir des automatismes, réfléchir à ce qu'on fait, se poser des limites. Ces engagements éthiques sont déjà pris par la plupart d'entre nous mais il peut être utile de les sortir de la clandestinité et de les afficher.
Cependant, adopter la qualification d'« écologiste » risque d'enclore dans une catégorie protestataire étroite ou de se voir reprocher des contradictions. C’est pourquoi notre objectif est de ramener l’écologieà la nature elle-même. En étant reliés à une grande diversité de mouvements, chacun sera en mesure de montrer qu’il participe d'une réalité très vaste, impossible à étiqueter sommairement. On pourrait parler de biodiversité associative à cultiver.
La connaissance scientifique est aussi nécessaire pour donner aux engagements éthiques un appui reconnu. Cette connaissance est fondamentale mais les experts suscitent parfois la méfiance dans la mesure où ils sont estimés dépendants de lobbies, parfois à juste titre. S'appuyer sur la connaissance est pourtant une condition essentielle. Comme les scientifiques indépendants sont de plus en plus rares, que ce soit pour inventorier la biodiversité ou pour déceler les effets des pollution, il faut essayer de mutualiser les ressources encore disponibles et disposer d'une liste de personnes référentes en tous les domaines.
L'association Païolive estime pouvoir initier un mouvement qui déborde sa zone d'intérêt et ses compétences propres dans la mesure où elle a pu synthétiser à partir d'un lieu remarquable des éléments de l'écologie qui sont souvent disjoints : science, éthique, sentiment de nature et inspiration. En ce sens Païolive peut devenir un laboratoire, comme les structures issues de Pierre Rabhi, ou encore Le Mât. Ultérieurement cette dynamique pourrait être portée par un collectif ou une autre structure.
Païolive garderait un rôle particulier en ce qu'il est un lieu à la fois riche et inspirant, un lieu où la nature parle à haute voix. La présence en son sein de Pierre Rabhi fait résonner au loin cette voix. Donner une voix forte à la nature et inviter à chercher en elle les solutions est peut-être le message de Païolive : ce qui peut nous relier c'est la nature, l'appartenance à elle. Coopérer avec elle et comme elle. La nature est un modèle mais avec lequel nous avons une relation d'appartenance et d'intériorité.
Nous souhaiterions que Païolive provoque une forme de symbiose, une forme nouvelle qui peut s'étendre .bien au-delà du site et de l'association éponyme.
Mode d'emploi
Cette déclaration appelle des signatures, individuelles ou au nom de structures. Dans sa forme le texte en est fixé jusqu'aux prochaines Rencontres du Vivant prévues pour 2016 mais elle peut, sur la base de son état actuel, recevoir des précisions, des développements.
Lors de la signature, chacun pourra ajouter des commentaires sur tel ou tel point précis.
Un forum sur le site www.vivrepaiolive.org permettra : commentaires, partages d'expériences, notamment sur tel engagement particulier, recherche de partenaires pour la mise en œuvre de tels ou tels points, etc...
Un premier point des signatures et des engagements reçus ainsi que des premières initiatives engagées sera fait fin 2014.